« Ils ont dit que les balles ne pouvaient ni nous blesser ni nous tuer »

Friday 6 April 2018

Yannick * avait quinze ans lorsque la milice a fait irruption dans son village dans la province de Kasaï Oriental pour recruter de force des enfants. « Ils menaçait de nous tuer et d’incendier nos maisons si nous ne rejoignons leur groupe », se souvient Yannick

Les miliciens m’ont emmené dans un autre village où ils organisaient le « Tshiota », une sorte de  rite initiatique qui conférait aux enfants des pouvoirs mystiques « d’invulnérabilité aux balles » et la force de combattre les militaires. Yannick* raconte qu’on leur a garanti que les balles ne pouvaient ni les blesser ni les tuer.

Armé d’un simple bâton, Yannick et trois autres enfants sont partis au combat contre les militaires eux armés. Les enfants avançaient vers les positions de l’armée en file indienne, décrit Yannick* et chaque enfant portait un ruban rouge sur la tête. « Les soldats ont ouvert le feu dès qu'ils nous ont aperçu. Au début, on était sans crainte parce qu’on croyait à nos pouvoirs mystiques. Nous sommes restés debout à attendre que les militaires épuisent leurs minutions », raconte Yannick*.

Lorsque les balles ont atteint deux d’entre nous, nous nous sommes rendus compte que les balles pouvaient non seulement nous atteindre mais également nous tuer. C’est à ce moment que nous avons fui dans la brousse.

Une nouvelle vie dans un club d’enfants

Je me suis caché pendant deux jours avec un autre enfant, tentant de fuir les militaires mais aussi la communauté par crainte de rejet. En effet, les anciens enfants soldats sont souvent victimes de stigmatisation de la part de la communauté. « Un jour, nous avons rencontré le personnel de Save the Children qui nous a accueilli », dit Yannick.

La mère de Yannick, Elizabeth* était furieuse lorsqu’elle a appris que son fils avait rejoint la milice à son insu. Grâce à l’intervention de Save the Children qui a mené une médiation auprès de sa mère, pour lui faire comprendre que son fils n'était pas un tueur et n’avait rien fait de mal, Yannick a pu retourner chez mère et retrouver une vie normale.

Yannick* est désormais membre du club d’enfants, un groupe initié par Save the Children pour suivre les enfants affectés par les conflits armés. Ce programme permet également au personnel formé de Save the Children, de surveiller les enfants et d'identifier ceux qui ont besoin d’un suivi supplémentaire.

Yannick* se plait dans le club d’enfants et aime jouer aux cartes et au football, ce qui l’aide à oublier certains mauvais souvenirs. Yannick voit son futur plein d’espoir et rêve de retourner à l'école le plus rapidement possible afin d’avoir un avenir.

Bien que Yannick ait réussi à quitter le groupe armé, beaucoup d’entre eux sont encore emprisonnés par la milice qui sévit dans la région du Kasaï en RDC. On estime qu'environ la moitié des combattants de cette milice sont des enfants.